Pour les transports publics, le renouvellement des flottes existantes dans leur globalité à l’horizon 2025 a déjà démarré pour les bus (cas de la RATP qui vise le remplacement progressif de ses 4 500 bus par des bus électriques pour la grande majorité et quelques-uns au biogaz).
Pour autant, les lignes ferroviaires (trains, métro, RER) bien qu’étant électrifiées en partie (SNCF) ou totalement (RATP), vont connaître de profonds changements dans les deux années à venir en relation avec le développement des « Railway Smart Grids » couvrant différents cas d’usages et déclinés selon plusieurs business modèles.
En France, les transports publics ferroviaires (trains, métro, RER) sont de très gros consommateurs d’énergie électrique, notamment pour assurer la traction des trains au quotidien.
C’est ainsi que la consommation annuelle de la SNCF s’établit à 9 TWh (c’est-à-dire 3 % de la consommation nationale), ce qui place cette entreprise en tête du classement des plus gros consommateurs d’énergie électrique français.
Elle est, dans le même temps, le 1er client industriel du secteur électrique avec 10 % des achats réalisés pour couvrir ses besoins. Cela représente un énorme budget annuel de 1,3 milliard d’euros et constitue pour la SNCF son 2e poste de dépenses le plus important, juste après les coûts de personnel.
Les achats d’énergie sont gérés par SNCF Energie, filiale à 100 % de SNCF Réseau, également en charge des investissements en matière d’énergies renouvelables et des négociations concernant les prix de l’énergie particulièrement volatiles. Cela a conduit à engager des achats anticipés sur des périodes allant de 10 à 20 ans auprès de divers producteurs.
L’ambition du Groupe SNCF est d’améliorer sa performance énergétique à hauteur de 20 % entre 2015 et 2025 par le développement d’un mix énergétique faisant la part belle aux énergies renouvelables dont les coûts s’avèrent moins volatiles (par exemple, biogaz pour les trains hybrides) et par une décarbonation progressive bien qu’actuellement son « core business » ne soit pas basé sur l’énergie.
Cette stratégie vise à développer à terme une véritable politique industrielle pour la production et l’autoconsommation d’énergie produite par SNCF Réseau en mettant à profit ses immobilisations et ses infrastructures (par exemple, installation sur les toits des gares de panneaux solaires et le long des voies de turbines éoliennes).
Aujourd’hui, ce sont 600 sous-stations électriques réparties partout sur notre territoire, mais surtout concentrées à proximité des zones à haute densité de population (autrement dit les villes) qui transforment le courant à haut voltage en provenance du producteur d’énergie en courant de traction (courant continu) et le distribuent aux trains via des caténaires au niveau des voies.
Pour autant, à ce jour, sur les 30 000 kilomètres de lignes desservis en France, seulement un peu plus de 15 000 kilomètres de lignes sont électrifiés. Le reste de ce réseau est utilisé par des trains à « traction autonome à moteur thermique Diesel », l’énergie étant dans ce cas chargée à bord du train dans un réservoir.
Focus sur la récupération de l’énergie au freinage
Les technologies de récupération de l’énergie au freinage constituent un nouveau marché dans les transports publics particulièrement convoité par nombre d’industriels et font l’objet de projets de Recherche & Développement sans pour autant qu’une solution particulière se dégage encore en vue d’un déploiement généralisé.
Les trains équipés pour récupérer l’énergie au freinage peuvent ainsi réutiliser une partie de l’énergie cinétique pour le fonctionnement de différents équipements auxiliaires installés à leur bord tels que l’éclairage, le chauffage, la climatisation, les écrans d’information voyageurs...
L’énergie restante peut quant à elle être renvoyée sur le réseau et être transférée à un train à proximité via une sous-station réversible. Sur un réseau de métro, ces transferts peuvent représenter entre 20 et 30 % de la consommation totale ce qui est loin d’être négligeable. Elle peut aussi servir à alimenter en électricité les gares et stations pour l’éclairage ainsi que les ascenseurs et les escaliers mécaniques destinés aux voyageurs.
Dans le cadre d’un projet de R & D entre SNCF Recherche & Innovation et le Pôle Efficacity, 3 pistes d’optimisation du fonctionnement énergétique des gares SNCF ont été explorées en 2017 :
- L’étude des possibilités de mutualisation énergétique du pôle d’échange multimodal de Val de Fontenay, commun à la RATP et à la SNCF, à partir d’une caractérisation fine de ses consommations énergétiques
- L’étude de la possibilité de récupération et de redistribution de l’énergie de freinage des trains sous forme de chaleur et/ou d’hydrogène. Elle a conduit à une modélisation globale du système intégrant l’électrolyseur avec comparaison de la taille des stockages mixtes électrique et hydrogène
- L’analyse de business modèles basés sur des usages de mobilité pour différents modes électriques (bus, voitures particulières, taxis) avec implantation de bornes de recharge en surface autour de la gare afin de tester la cohérence entre les besoins de consommation d’énergie et la capacité de production et de stockage provenant de l’énergie de freinage des trains, mais également d’énergie photovoltaïque produite localement.
Comme on peut l’imaginer, les « Railway Smart Grids » constituent désormais un terrain d’exploration extrêmement foisonnant avec une évolution drastique du management de l’énergie au quotidien voulue par les gestionnaires d’infrastructure de transports publics et visant une meilleure maîtrise de la consommation énergétique et la réduction des coûts d’exploitation.
Cette nouvelle approche stratégique montre également un changement de positionnement avec passage du statut de consommateur à celui de producteur et la nécessité de mettre en œuvre de nouvelles infrastructures dédiées à l’énergie pour assurer et suivre de bout en bout la production (interne et/ou externe), le stockage, la distribution, la consommation et la récupération en vue de sa réutilisation pour divers usages avec néanmoins des business modèles qui restent encore à identifier et à valider.